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Soumis par Nicolas Duchange le

Comment calculer un usufruit ?

L’évaluation d’un usufruit est une opération délicate. Voici une méthode simple - mais non pas simpliste.

Dans une succession, la répartition de la propriété d’un bien entre un usufruitier (souvent le conjoint survivant) et des nu-propriétaire est très fréquente. Cependant la valorisation des droits de chacun fait appel à de nombreux paramètres. Prendre connaissance de la complexité de la méthode de calcul de la valeur d’un usufruit permet de comprendre pourquoi il peut être opportun de s’en tenir à l’application d’un barème forfaitaire.

Rappel de la définition de l’usufruit

Aux termes de l’article 578 du Code civil « l’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance. »

• Les droits économiques de l’usufruitier – L’usufruitier tire les fruits et revenus de la chose ou l’utilise en en prenant soin pour en assurer la conservation. >>> La valeur de l’usufruit sera directement liée au rendement de la chose (ce qui implique d’apprécier l’importance, la régularité et la durabilité de ce rendement).

• Les pouvoirs juridiques de l’usufruitier – L’usufruitier bénéficie des pouvoirs d’administration étendus d’un propriétaire. Mais il ne peut disposer du bien sans l’accord des nu-propriétaire. >>> La valeur de l’usufruit devra tenir compte des contraintes de gestion de l’usufruitier.

• Un droit viager – L’usufruit s’éteint au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devenant alors pleinement propriétaire de la chose. >>> La valeur de l’usufruit sera directement liée à l’espérance de vie de l’usufruitier, laquelle sera fonction de son état de santé et de ses conditions de vie.

La complexité : la valorisation financière d’un usufruit

Le calcul financier applique la méthode d’actualisation des flux futurs selon laquelle la valeur d’une chose résulte de la somme des flux financiers que cette chose produit ou est susceptible de produire au cours de son existence. La mise en œuvre d’un tel calcul permet de tenir compte du sexe de l’usufruitier, de son mode de vie, de son état de santé et du taux de rendement de chaque bien concerné.

Mais d’âpres discussions peuvent survenir lors de la fixation des données à retenir, qui peuvent être différentes pour chacun des biens concernés, notamment en ce qui concerne le taux d’actualisation financière (un immeuble n'ayant pas le même rendement qu'un portefeuille d'actions ou qu'un objet de valeur).

Ainsi pour un bien rapportant 10.000 € par an à un usufruitier ayant 10 années d’espérance de vie, la valeur de l’usufruit est estimée à 85.300 € avec un taux d’actualisation de 3 %, à 81.100 € avec un taux de 4 % et à 77.200 € avec un taux de 5 %...

La simplicité : le recours à un barème

Cette difficulté n’est pas nouvelle. Différents solutions simplificatrices ont ainsi été successivement proposées par le Législateur. La loi du 22 frimaire An VII évaluait systématiquement l’usufruit à la moitié de la pleine propriété.

Puis la loi du 25 janvier 1901 est venue instaurer une règle d’évaluation se basant sur l’âge de l’usufruitier (70 % pour les moins de 20 ans, 60 % pour les moins de 30 ans, et ainsi de suite jusqu’à 10% pour les usufruitiers âgés de 70 ans et plus). Mais ce texte était construit sur les tables de mortalité de 1893, faisant apparaître une espérance de vie de 49 ans pour les femmes et de 46 ans pour les hommes, et sur un taux d’actualisation de 4 % l’an.

La loi du 30 décembre 2003 est donc venue réactualiser le barème fiscal en basant l’actuel article 669 I du Code général des impôts sur la table de mortalité de l’INSEE 1996/1998 et en retenant un taux d’actualisation de 3% l’an (90 % pour les moins de 21 ans, 80 % pour les moins de 31 ans, et ainsi de suite jusqu’à 10% pour les usufruitiers âgés de 91 ans et plus).

Cette mise à jour n’a pas fait disparaître toutes les critiques. Notamment il lui est reproché d’avoir maintenu des paliers fixes de dix ans et d’avoir conservé une référence unisexe.

Toutefois ce barème décennale ne s’impose que pour la liquidation des droits d’enregistrement et de la taxe de publicité foncière. Il a donc été suggéré de l'écarter dès qu’il n’est pas obligatoire et de lui substituer un barème plus détaillé s’en tenant aux données statistiques et financières fondant le barème fiscal mais faisant évoluer la valeur de l’usufruit chaque année.

C’est ce barème qui est proposé en pièce jointe, à télécharger ci-dessous.

Il ne peut prétendre avoir la pertinence économique d’un calcul financier. Mais, concernant un patrimoine diversifié soumis à l’usufruit d’une personne sans alerte de santé, il est de nature à faciliter la conclusion d’accords transactionnels, du fait qu'il peut être appliqué à tous les biens compris dans l'indivision et qu'il tend à minorer les droits de l'usufruitier, favorisant ainsi la transmission des patrimoines.

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Anne DELANNOY

Pôle Famille & Patrimoine